expographie 1
SYLVAIN SORGATO
30 ans de Montages
C'est depuis son atelier que j'ai pu assister aux évolutions de l'activité "art contemporain" depuis le milieu des années 80, j'en rends compte avec cette conférence.
L’exposé présente les rôles et les responsabilités des personnels techniques qui servent les œuvres et les expositions.
J' y parle de ceux qui fabriquent, construisent, réalisent les expositions au service des artistes et des commissaires d’exposition.
Pour ce faire, je m'appuie s’appuie sur ce qu’a pu être mon service aux œuvres et aux expositions depuis 1988.
Si j’ai fait et si je fais encore ce travail de monteur, d’assistant ou de régisseur pour l’art contemporain, c’est en premier lieu parce que l’art m’intéresse. Et la meilleure façon que j’ai trouvé de m’intéresser à l’art c’est de me tenir au plus près de l’acte artistique.
La technique m’intéresse uniquement comme un instrument au service au projets.
Mon travail consiste à proposer une ou plusieurs réponses techniques pertinentes à une intention énoncée, à un projet déclaré.
Il m’est donc indispensable qu’il y ait un auteur, qu’il s’agisse des œuvres ou de l’exposition, d’un artiste ou d’un commissaire, faute de quoi il me semble difficile de parler à priori d’art et à fortiori d’oeuvres.
J’ai pu participer depuis 1988 au montage d’un certain nombre d’expositions et à la réalisation d’un certain nombre d’œuvres, et cela m’a permis de construire un point de vue singulier sur l’activité artistique telle qu’elle se développe depuis le milieu des années quatrevingt en France.
Je tiens l’exposition pour un mode d’expression spécifique, employant un vocabulaire spécifique.
L’art de l’exposition est celui de la disposition d’un certain nombre d’objets dans un espace afin de produire une expérience singulière de l’expression du sens.
I - L'exposition
Fred Sandback (1943-2003)
Four Parts Construction
installation en cours, 2011, collection privée
La sélection, personnelle, des expositions citées ici, vaut pour ce qu’à mon sens elles peuvent indiquer de l’histoire récente des expositions de l’art contemporain.
J’ai eu le privilège de servir les expositions suivies d’une astérisque.
sept expositions remarquables :
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When attitudes become form : live in your head, Bâle 1969
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Chambres d'amis, Gand, 1986
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Les magiciens de la terre, Paris, 1989
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Konstrukcja w procesie, Łódź, 1990*
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No man's time, Nice, 1991*
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Passions privées, Paris 1995*
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L'intime, le collectionneur derrière la porte, Paris, 2004
When attitudes...
Harald Szeeman (1933-2005) devant la Kunsthalle de Berne, Suisse en mars 1969
photo : Balthazar Burckhardt
Figure emblématique et persistante du commissaire d’expositions de l’art contemporain, on doit à Harald Szeeman la plupart des modèles d’exposition d’art contemporain en vigueur aujourd’hui, ainsi que l’ouverture à des thèmes encore en usage.
... become form, live in your head
Joseph Beuys installant Fettecke en mars 1969
photo : Balthazar Burckhardt
Harald Szeeman établit notamment que l’espace d’exposition puisse être envisagé comme une continuité de l’atelier.
Avant d’être le lieu de la contemplation, la salle d’exposition peut être un lieu de travail.
Les expositions sont une occasion de travail pour les artistes, qui leur permettent de réaliser des œuvres spécifiques et ponctuelles.
Cette approche se distingue d’une autre qui voudrait produire le rassemblement thématique d’œuvres existantes.
Chambres d'amis
Daniel Buren
Le Décor et son double, 1986
papier peint à rayures blanches et fuschia, dimensions variables
exposition : Chambres d’amis, domicile d’Annick et Anton Herbert, Gand, Belgique; commissaire : Jan Hoet
Jan Hoet sort l’exposition des lieux qui lui sont traditionnellement dédiés.
Pour Chambres d’Amis , il installe les œuvres dans des environnements « réels », puis leur double dans des lieux de présentation traditionnels des œuvres.
Chambres d'amis
Daniel Buren
Le Décor et son double, 1986
papier peint à rayures verticales blanches et fuschia, dimensions variables
exposition : Chambres d’amis, S.M.A.K., Gand, Belgique; commissaire : Jan Hoet
L’exposition muséale était le calque de la situation produite dans l’habitation.
Comme un rappel de la citation due à Robert Filliou qui disait : l’art est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art (1973).
L’art, en tant que vécu, compte au moins autant que l’art en tant que production officiellement artistique.
Jan Hoet affirme le lieu d’exposition comme celui de la représentation, entretenant une ambigüité avec le réel.
Les magiciens de la terre
Richard Long : Red earth circle, 1989
Collectif : Yam Dreaming, 1989 (au sol)
Esther Mahlangu : (titre et date inconnus)
Grande Halle de la Vilette et centre Georges Pompidou, Paris, été 1989; commissaire : Jean-Hubert Martin
Jean-Hubert Martin élargit encore le cadre de ce qui est acceptable comme art.
Jean-Hubert Martin entretient une sensibilité particulière de l’époque en puisant dans ce que l’on nommait le « World Art » qu’il fait voisiner avec des références de l’art contemporain.
L’exposition panache des formes exotiques entre elles pour réintroduire de l’émerveillement dans des espaces que les années soixante-dix et quatrevingt avaient considérablement »refroidi ».
Konstrukcja w procesie
Karin Sander
White Passageway, 1990
réhabilitation d’un passage existant
exposition : Contruction in Process III, Lodz, Pologne, automne 1990
Troisième édition d’une exposition en actes.
Son énoncé précise que les artistes invités doivent réaliser sur place des œuvres spécifiques.
Cette contrainte est portée par le contexte particulier de ces événements qui ont eu lieu successivement à Lodz, à Munich et à Lodz.
Contexte qui s’exprime par les pressions politiques et économiques exercées sur les artistes concernés comme sur le commissariat général de l’exposition par le pouvoir en place à l’époque.
L’épopée de Konstrukcja w Procesie débute pendant la guerre froide et se termine après la chute du mur de Berlin.
No man's time
Philippe Parreno
No More Reality, 1991
peinture acrylique sur panneaux, 180 x 200 cm
exposition : No Man’s Time, villa arson, Nice, été 1991
Cette exposition introduit une génération d’artistes qui vient succéder à celle, en France, représentée notamment par Ange Leccia et Jean-Luc Vilmouth.
Avec cette exposition, Eric Troncy affirme un projet esthétique fondé sur une avant- garde jeuniste et « pop » qui sera développée par Nicolas Bourriaud au titre de l’Esthétique Relationelle .
(parenthèse)
Sonic Youth : Evol, SST records, 1986
Photo : Richard Kern, image extraite du film Submit to Me, 1986
Bret Easton Ellis : American Psycho, roman, première édition : Vitntage Books, New-York, 1991
Photo : Marshall Arisman
Au début des années quatrevingt-dix, l’esthétique Grunge et le narcissisme permis par la finance succèdent au formalisme comme référents esthétiques de l’époque.
Il s’agit d’un mélange d’esthétique Punk et d’hyper-consumérisme occidental.
Kontrukcja W Procesie – No Man’s Time ont été des expositions conscientes de leur environnement culturel, médiatique ou politique.
Passions privées
Felice Varini
273, boulevard Pereire n°1, 1989
réactualisation 1995, collection du Musée d’Art Moderne de la ville de Paris
Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, automne 1995
Alors que l’activité artistique semble dominée par les institutions mises en place par le projet de décentralisation conduit par Jack Lang depuis le premier mandat de François Mitterrand, cette exposition révèle en France le rôle et la place occupée par les collections privées.
L'intime, le collectionneur derrière la porte
Exposition : L’intime, le collectionneur derrière la porte
la maison rouge, Paris
5 juin - 26 septembre 2004
L’exposition inaugurale de la maison rouge installe dans le paysage de l’activité artistique la figure du collectionneur-mécène incarnée ici par Antoine de Galbert.
L’installation, parmi les opérateurs de l’activité artistique, de cette figure de l’autodidacte soutient une tendance visant à l’évacuation des contenus artistiques au profit d’événements susceptibles d’attirer le public le plus large.
L’exposition dépouille sa matrice originelle des œuvres qui s’y trouvaient, pour les replacer dans le contexte d’un événement spectaculaire (l’inauguration de la maison rouge).
II - Typologie des oeuvres
Peter Bruggenhout
The Blind Leading the blind #68, 2015
Après avoir campé dans le paysage quelques expositions, je vais maintenant déployer une typologie des œuvres telles qu’on les trouve dans les expositions, œuvres que le service technique aura à accrocher, installer, réaliser ou réactualiser.
Le statut