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Pince-moi, je rêve

– T’es sûr que t’est pas une fiction?
- Mais non, attends, ferme les yeux et regarde : le sable crisse contre mes dents. Je l’entends. C’est pas très douloureux mais ça existe vraiment, et moi avec.
Tu vois, enfin, non : justement : tu ne le vois pas puisque c’est de ton propre corps dont il s’agit. C’est là-dedans que t’es. Tu ne peux jamais voir dans ton corps, seulement l’enveloppe, c’est-à-dire la surface. Et la surface c’est insatisfaisant. C’est pour ça que la télé et les affiches abrutissent : c’est que des surfaces. 
Pas plus que tu ne peux voir dans ton corps tu ne peux voir dans ta bouche : ce qui s’y passe avant que ça ne sorte. Les doigts sentent, mais ne voient pas alors la langue, tu parles!
Et puis c’est trop compliqué : techniquement on a du mal à séparer les muscles des nerfs, tout baigne, et il est difficile de dire avec précision où l’on est situé dans son propre corps. Des fois c’est culturel, pathologique, c’est sujet à changements.
Est-ce que je suis tantôt mon foie? Tantôt mon pouce? Sous l’ongle de mon pouce? Et mes dents de lait et ces menstruations elles sont quoi de moi? Qu’est-ce qui sépare vraiment une oreille d’un coude? Le cœur?
Reste le dessin, et le regard qui serait le fil entre un corps et un autre. La main aimable, le cerveau dans les yeux, à produire d’autres opaques qui eux aussi, auraient à dire de soi. 

La mésange elle s’en fiche. Elle titine, zinzibule et zinzinule sans l’avoir jamais su et prend le fil de ma main pour la branche qui lui convient.


Sylvain Sorgato

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Rita

2016
dessin et techniques mixtes

100 x 70 cm

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